Chronologie des Types de Sabres Japonais
Ère historique KOFUN de 250 à 538O
Les épées Jokoto (Chokuto)
De 250 à 900 après J.C
Cette épée a été découverte dans l'un des premiers tumulus les plus célèbres du Japon, connu sous le nom de kofun Eda Funayama (tumulus), situé dans la préfecture de Kumamoto, sur l'île de Kyūshū, dans le sud du Japon. Le monticule, qui a été fouillé pour la première fois en 1873, a livré de nombreux objets rares, notamment des bijoux, des couronnes, des chaussures de cérémonie, des pièces d'armure, des miroirs et plusieurs épées, tous de très haute qualité.
Les premiers Nihonto (日本刀), ou sabres japonais, ont manifestement puisé leur inspiration des épées chinoises du VIIe siècle. Précédant cette période, toutes les armes étaient modelées sur des épées, influencées par les modèles chinois ou coréens.
Les Jokoto (直刀), ou sabres d'une antiquité notable, présentent une lame à simple ou double tranchant, parfois légèrement courbée ou droite. Le jokoto tire son inspiration de l'épée chinoise longue avec un pommeau en anneau, caractéristique de la dynastie Han. Contrairement aux sabres plus récents, ils sont rarement soumis à une trempe sélective. Sur les exemplaires les plus remarquables, la qualité de la forge équivaut à celle réalisée ultérieurement. Ces sabres furent forgés approximativement entre 645 et 900. Tout ce qui a été forgé avant l'ère Jokoto était alors considéré comme des épées.
Les lames de cette époque étaient majoritairement forgées en une seule pièce, qualifiée de maru, en contraste avec les méthodes ultérieures. Bien que peu de sabres de cette période aient survécu en bon état, les exemples les mieux préservés révèlent que ces lames primitives étaient déjà constituées d'un acier de très haute qualité, mettant en lumière l'importance de la sélection des matériaux à cette époque.
Longtemps, on attribua à Amakuni, suivi de son fils Amayuki, le rôle de précurseurs dans l'évolution de ces armes. Cependant, des révisions actuelles remettent en question ces informations, car l'étude de certaines de leurs lames suggère qu'elles pourraient être plus récentes que prévu. Néanmoins, des légendes, telles que celles des forgerons Shinsoku ou Shurin, demeurent parmi les plus anciennes histoires relatées sur les sabres, remontant à cette époque où naquirent les premières lames légendaires du Japon.
Ainsi, à partir du VIIe siècle, les Japonais ont commencé à forger des armes ancrées dans leur propre culture, marquant véritablement le début de l'histoire du sabre japonais.
Ère historique :
HEIAN de 782 à 1184
KAMAKURA de 1185 à 1332
NAMBOKUCHO de 1333 à 1391
MUROMACHI de 1392 à 1572
MOMOYAMA de 1573 à 1599
Les sabres Koto
De 900 à 1596
Les sabres Koto (古刀), également connus sous le nom de sabres anciens, se caractérisent par leur courbure et leur tranchant unique sur toute leur longueur. Au cours de cette période, ces lames sont devenues des armes de tous les jours, constamment portées par les samouraïs. Les forgerons ont commencé à apposer leur signature (mei) au niveau de la soie (nakago). La partie proche de la garde (tsuba) ainsi que la poignée (tsuka) présentent une courbure distinctive, conférant aux sabres une apparence similaire à celle que l'on associe aujourd'hui aux lames japonaises. Les Koto ont été forgés approximativement entre l'an 900 et 1600, avec l'avènement de lames dites composites, composées de plusieurs types d'aciers, plus ou moins tendres, pour accroître la souplesse des sabres.
La période des sabres Koto peut être divisée en trois groupes chronologiques. Tout d'abord, la fin de la période Heian, de l'an 900 à 1185, caractérisée par l'instabilité au Japon et de fréquentes guerres entre les clans. Les sabres ont évolué en devenant plus courbés pour mieux absorber les chocs, avec la plupart des sabres longs étant des tachi et les sabres courts des jintachi.
Ensuite, la période Kamakura, de l'an 1185 à 1333, a vu l'établissement des Gokaden (五ヶ伝), les cinq traditions, qui classifiaient les styles de forge du nihonto. Ces styles, Yamato (région actuelle : Nara), Yamashiro (région actuelle : Kyoto), Bizen (préfecture actuelle : Okayama), Soshu (Sagami, dans la région de Kamakura) et Mino (Seki, préfecture actuelle : Gifu), ont constitué des moyens essentiels d'améliorer et de perpétuer l'art de la forge pendant l'ère Koto. À partir de la période Kamakura, des trempes complexes et des mélanges d'aciers élaborés ont été utilisés, marquant probablement les débuts des katana et wakizashi.
Enfin, la période Muromachi, de l'an 1336 à 1573, a débuté par une longue période de paix, transformant les sabres en objets plus artistiques que militaires. Des montures (koshirae) élaborées et des décorations multiples ont fait leur apparition, et de nombreuses pièces d'une excellente facture ont été produites à cette époque. Des noms renommés de forgerons ont marqué le XIVe et le XVe siècle de leur empreinte.
Plus tard dans cette période, les guerres d'Onin et le Sengoku Jidai ont marqué la fin de la paix, entraînant une demande massive d'armes. La forge au XVIe siècle était généralement de qualité médiocre, à quelques exceptions près. L'introduction du mousquet par les Portugais en 1543 a radicalement changé les tactiques de combat, mettant davantage l'accent sur les Yari (lance) et les Naginata (hallebarde), ce qui a également influencé la forge des sabres.
Ère historique EDO de1600 à 1734
Les sabres Shinto
De 1597 à 1780
Très belle lame du forgeron Kanewaka qui était le forgeron d'épées le plus célèbre de Kaga (aujourd'hui dans la préfecture d'Ishikawa) pendant la période shinto.
Entre la fabrication d'une épée datée du 18 septembre 1619 et sa prochaine épée enregistrée, datée de janvier 1621, Kanewaka a commencé à signer ses lames du nom de Takahira et à inclure deux titres importants qui lui ont été accordés par l'empereur. Cela se voit dans la signature sur l'épée : Etchū no kami Fujiwara no Takahira (Takahira, gouverneur honoraire d'Etchū, membre honoraire de la famille Fujiwara).
Ses dernières lames signées Takahira, dont celle-ci est parmi les plus belles, montrent une modification du motif koitame , un petit effet de grain de bois finement structuré.
Le motif de la ligne de trempe le long du bord de la lame est également un élément stylistique clé. Ici, Takahira a choisi un motif oblique en forme de clou de girofle avec des lignes en zigzag mélangées influencées par les lames des écoles Mino et Aoe du milieu du XIVe siècle pour créer une ligne de trempe qui est l'une des plus attrayantes de ses œuvres connues.
Après la période des provinces en guerre (Sengoku Jidai), une ère de paix s'ensuivit, induisant une transformation significative dans l'évolution des sabres. Un édit fut émis pour restreindre le port du sabre aux seuls membres de la caste des samouraïs. Les plus belles lames furent reléguées, tandis que les plus courantes furent réaffectées à d'autres usages. De nombreux forgerons se virent contraints de se réorienter vers la fabrication de ciseaux et d'accessoires de cuisine.
Les sabres Shinto (新刀), littéralement "nouveaux sabres", furent forgés approximativement entre 1600 et 1800.
Les forgerons commencèrent à structurer leur commerce en fonction de l'influence d'un seigneur de guerre, d'une chapelle religieuse ou d'un temple. L'emplacement géographique devint crucial, avec une proximité recherchée par rapport aux routes commerciales pour faciliter les échanges avec les acheteurs potentiels et les fournisseurs de matières premières. L'amélioration du système de transport national a également contribué à ces avancements. À partir de cette époque, les techniques de forge ont considérablement progressé.
Les méthodes de production de l'acier ont été perfectionnées à la fois pour accroître la quantité et pour uniformiser la qualité. Les cinq traditions se sont entremêlées, favorisant les échanges et les voyages entre différentes régions.
Les forgerons ont ainsi migré d'une région à l'autre, engendrant des mélanges de styles entre les écoles, et la forge a bénéficié des nombreuses évolutions liées aux sabres, donnant lieu à la création de nombreuses lames de qualité. Pour diverses raisons, les sabres Shinto représentent aujourd'hui la grande majorité des nihonto en circulation, soit environ deux sabres sur trois. Juste avant cette période, le Japon avait connu d'importantes guerres où de nombreuses lames antiques furent utilisées et usées.
Un édit interdisant le port d'armes aux non-samouraïs fut instauré, entraînant la confiscation et la destruction de nombreux sabres anciens. Après cette période, les conflits majeurs impliquant une utilisation massive de sabres devinrent rares, à l'exception de la Seconde Guerre mondiale survenue bien plus tard.
De nombreuses lames furent reléguées à l'inactivité, car les sabres ancestraux ne furent plus sortis que par les familles de samouraïs, représentant environ 6% de la population japonaise. Certains sabres et dagues de cette époque furent créés exclusivement à des fins cérémonielles ou décoratives, demeurant ainsi bien préservés.
Ère historique EDO de1734 à 1867
Les sabres Shinshinto
De 1781 à 1876
Lame forgée dans le style Bizen par Naotane Taikei datée de 1839
Gravure sur lame attribuée à Honjō Yoshitane qui a décoré de nombreuses lames de Naotane.
La période post-Shinto au Japon a été marquée par des conflits majeurs concernant l’ouverture du pays à Satsuma et Hizen.
Ces désaccords ont contraint le shogunat à céder le pouvoir à l’Empereur.
Les sabres Shinshinto (新新刀), ont été forgés entre 1800 et 1867
Les sabres fabriqués à cette époque ont cherché à imiter les styles de lames beaucoup plus anciens, ce qui a conduit à la réintroduction du tachi après une longue absence.
La modernisation du pays a entraîné une diminution du système féodal et du prestige des samouraïs pendant cette ère.
Une caractéristique de cette période est que les forgerons ne se sont plus limités à une seule tradition, mais ont tenté de les combiner.
Les cinq traditions sont donc revenues sur le devant de la scène, mais en se mélangeant les unes aux autres, ce qui a donné lieu à une grande diversité de lames.
La production de tanto, qui avait diminué, a repris, tout comme celle des tachi, principalement pour l’apparat ou la décoration.
Edo est devenue le centre de production des sabres pendant cette ère. Étant une période de paix, de nombreuses lames n’ont été produites qu’à des fins esthétiques ou décoratives, et de moins en moins de sabres ont été forgés pour le combat.
Suishinshi Masahide serait à l’origine du mouvement shinshinto.
Cette ère s’est terminée par la guerre de Boshin, qui a eu lieu en 1868 et 1869, une guerre civile entre les forces du shogunat Tokugawa et les troupes restées fidèles à l’empereur.
De nombreux forgerons ont adopté les aciers européens (allemands et portugais notamment), appelés nanbantetsu ou hyotantetsu ou konohatetsu, suite aux échanges avec les pays occidentaux.
Il y a donc une grande disparité entre les qualités des aciers de cette ère.
De nombreux puristes n’apprécient pas les shinshinto pour cette raison.
Pour diverses raisons, il reste aussi beaucoup de shinshinto comparativement aux autres périodes. On estime qu’environ trois nihonto sur quatre sont shinto ou shinshinto aujourd’hui.
Ère historique :
MEIJI de 1868 à 1912
TAISHO de 1912 à 1989
Les sabres Gendaito
De 1877 à 1945
Tachi réalisé par l'un des meilleurs forgerons Gendai, Takahashi Yoshimune.
Né en 1897, il était le frère aîné de Takahashi Sadatsugu (le premier Ningen Kokuho) et était originaire de la préfecture d'Ehime.
À la suite de l'ère des Shinshinto, la restauration de Meiji a marqué le renversement du shogunat Tokugawa et le rétablissement du pouvoir impérial. Cette nouvelle ère a débuté au cours de la guerre Boshin, pendant laquelle des sabres ont été produits pour les derniers samouraïs s'opposant à l'empereur. Initialement nombreux et de haute qualité, ces sabres, appelés Gendaito (現代刀) ou sabres modernes, ont été forgés de 1867 à 1945.
Au fil du temps, la forge de sabres a évolué pour être considérée comme un art, et la recherche esthétique des sabres est devenue prédominante. En 1871, le gouvernement a établi le département des antiquités et de leur conservation. Cependant, en 1876, le décret Haitorei a interdit le port de sabres, entraînant un déclin rapide de la demande. Les forgerons ont perdu leur prestige et ont dû diversifier leur production, fabriquant notamment des ciseaux et des couteaux pour subvenir à leurs besoins.
En 1890, l'empereur a créé le titre de Teishintsu Gigei, qui évoluera avec le temps pour devenir le titre de Trésor national vivant. Cet honneur a été instauré pour encourager les artisans et préserver les compétences traditionnelles artistiques du Japon, devenant rapidement le plus grand honneur qu'un artisan pouvait recevoir. En 1897, le système de nomination des sabres en tant que trésors nationaux a débuté, initialement pour les lames détenues par les temples et les chapelles, puis étendu à toutes les collections en 1933.
Ces mesures ont contribué à prévenir l'exportation de nombreuses lames vers d'autres pays et ont préservé l'art de la forge des nihonto. Pendant cette ère, tous les sabres n'ont pas été fabriqués selon des procédés classiques (forge manuelle et trempe à l'eau) en raison de la demande militaire. Deux types de sabres produits à cette période, les Murata-to, fabriqués avec des machines mais de bonne facture, et les Showa-to, également réalisés avec des machines mais de piètre qualité, ont émergé. Ces derniers sont facilement identifiables par un numéro de série et une fleur de cerisier gravés sur la soie de la lame.
Les sabres militaires, ou gunto, étaient parfois assemblés avec d'anciennes lames familiales, ne suivant pas la même classification. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, un événement regrettable s'est produit lorsque de nombreux sabres ont été confisqués et détruits par l'armée américaine, conformément à un décret des vainqueurs interdisant les armes, même les plus anciennes. Il a fallu plusieurs années au Japon pour mettre fin à ces destructions, et de nombreuses pièces ont été ramenées aux États-Unis par les soldats américains, expliquant la profusion de sabres là-bas.
Ère historique :
SHOWA de 1926 à 1989
HEISEI de 1989 à 2019
REIWA de 2019 à aujourd'hui
Les sabres Shinsakuto
De 1948 à nos jours
Tanto réalisé par Teiichi Tsukiyama (2e génération).
En 1971, ses compétences exceptionnelles en matière de fabrication d'épées ont été reconnues et il a été certifié Trésor national vivant (détenteur d'un bien culturel immatériel important).
En 1948, le Nihon Bijutsu Token Hozon Kyokai (NBTHK) fut fondé par un groupe de collectionneurs, de connaisseurs et d'artisans dans le but de préserver l'héritage des sabres japonais. En l'espace de deux années, 880 sabres furent officiellement désignés comme étant d'une importance culturelle majeure (juyo bunkazai), dont 120 obtinrent le statut de trésors nationaux. La levée de l'interdiction des armes au Japon en 1953 marqua un tournant significatif, permettant ainsi la préservation des antiquités restantes.
Les Shinsakuto (新作刀), communément appelés sabres contemporains, sont des créations forgées après la levée de l'interdiction de la fabrication de lames d'après-guerre, soit depuis 1953 jusqu'à nos jours. La forge est désormais considérée davantage comme un art que comme la simple confection d'un outil, intégrant ainsi les sabres japonais dans le domaine des arts et métiers. Depuis 1955, le Shinsaku Meitoten, un concours annuel de forge, se tient à Tokyo, mettant en lumière les chefs-d'œuvre des derniers maîtres forgerons contemporains, qui intègrent les avancées techniques au fil du temps dans la création de leurs extraordinaires sabres.
Il est essentiel de souligner que, en tant que travail reconnu comme un artisanat traditionnel, les maîtres forgerons sont eux-mêmes considérés comme des trésors nationaux vivants. Leurs lames sont d'une qualité exceptionnelle.
De nombreux nihonto plus anciens ont été restaurés et remis en valeur.
La loi sur la protection des biens culturels de 1950 a jeté les bases de la politique patrimoniale du Japon, classant depuis lors plus de 1000 trésors nationaux.
Il est désormais interdit de faire sortir du pays tout sabre classé kokuho, c'est-à-dire trésor national. Plus de 120 nihonto sont répertoriés comme trésors nationaux, dont près d'un tiers se trouvent à Tokyo.