Munechika, forgeron de légende

Premier grand maître des sabres japonais Kyōmono (sabres japonais forgés à Kyoto) Sanjō Munechika forgeait ses lames à Kyoto au milieu de la période Heian (794-1185).
Considéré comme le fondateur de l'école Sanjō , il était le deuxième fils de Tachibana Nakatono, un noble de la cour impériale.
Avant d'adopter le nom de Munechika (宗近), il portait celui de Nakamune (仲宗).
Bien qu'il ait été anobli sous le titre de « Shinano Daijō », il consacrait son temps libre à la forge dans sa demeure de Sanjō.

Parmi les contes qui traversent l’histoire des Nihonto, la légende du forgeron Munechika et de l’esprit du renard, Kitsune, occupe une place unique.
À l’époque Heian (794-1185), Munechika, fut chargé de réaliser un sabre exceptionnel pour l’empereur.
Cependant, la tradition imposait que la création d'un tel Nihonto soit réalisée par deux forgerons.
Solitaire dans sa forge, Munechika pria Inari, la divinité protectrice des artisans, au sanctuaire Fushimi Inari-taisha.
Ses prières furent exaucées lorsqu'une femme énigmatique apparut, lui offrant son aide.
Ensemble, ils forgèrent une lame d’une finesse inégalée. Lorsqu’elle fut achevée, la femme révéla sa véritable nature : un renard, messager de la déesse Inari.
Le sabre fut nommé Mikazuki Munechika (« Croissant de lune »), en raison des motifs subtils en forme de croissant visibles sur la lame.
Cette légende, rapportée dans plusieurs chroniques japonaises, comme le Meibutsu Chō (registre des sabres célèbres), met en lumière l’importance de la foi et de la dévotion dans l’artisanat traditionnel.
Elle illustre aussi la place centrale de la relation entre l’homme et le divin dans la culture japonaise.
Munechika est célèbre pour son savoir-faire exceptionnel, reconnu bien au-delà de Kyoto. Selon certaines traditions, il aurait voyagé jusqu'à la province de Satsuma (Kagoshima) pour étudier l'art de la forge aux côtés du maître Naminohira Yukiyasu.
D'autres théories suggèrent qu'il était originaire de la province de Kawachi (Osaka). Bien que la date exacte de sa mort reste incertaine, on estime qu'il s'éteignit en 1033 à l'âge de 77 ans.
L’Héritage Spirituel et Culturel de Munechika
Le sanctuaire Kaji, situé à Higashiyama-ku, Kyoto, lui est dédié, témoignant de son importance spirituelle dans l'univers de la forge.
Une légende de l'époque Muromachi rapporte que Munechika forgea un sabre sur ordre de l'empereur Ichijō (règne : 986-1011). Cet acte renforce son statut de forgeron au service de la cour impériale.
Les Sabres Emblématiques de Sanjō Munechika
Les œuvres de Munechika sont rares, mais leur renommée traverse les siècles.
Parmi les plus célèbres figure le sabre "Mikazuki Munechika" (Croissant de Lune), l'un des cinq sabres célestes ( Tenka Goken ), classé trésor national.
Deux autres pièces notables sont l'Ebina Kōka-ji et le Takanosu Munechika.
Bien qu'il soit dit qu'il aurait forgé des sabres pour des figures illustres comme l'empereur Go-Toba, le moine Shinzei et le guerrier Musashibō Benkei, ces affirmations restent sujettes à caution.
Mikazuki Munechika :
L’élégance légendaire du sabre japonais

Le Mikazuki Munechika, véritable chef-d'œuvre de l'artisanat japonais, est considéré comme l'un des plus beaux sabres jamais réalisés.
II fait partie des Cinq grandes épées sacrées du Japon (Tenka Goken), et est souvent décrit comme le plus gracieux de tous.
Son nom, Mikazuki, signifiant "croissant de lune", provient de l'uchinoke (火瀬, motif subtil de trempe) ornant la lame, dont la courbure évoque la silhouette d'une lune flottante.
Ce sabre est inscrit dans le "Kyoho Meibutsu Cho"
(亨保名物帳), un registre précieux des trésors japonais compilé sous le shogunat Tokugawa, où il est qualifié de "meibutsu" (名物), c'est-à-dire un sabre de grande renommée.
Les légendes autour du Mikazuki Munechika
L'histoire de ce sabre japonais est auréolée de mystères et de légendes.
Selon certaines chroniques, il appartenait autrefois au shogunat Ashikaga, joyau transmis de génération en génération.
Une théorie suggère que le 13e shogun, Ashikaga Yoshiteru, perdit le sabre lors de l'attaque du château de Nijō par Matsunaga Hisahide et le clan Miyoshi, événement marquant de l'époque des guerres féodales (Sengoku jidai).
Une autre tradition affirme que Yamanaka Shikanosuke, vassal fidèle du clan Amago, porta ce sabre en combattant pour la résurrection de son fief durant la période des Etats en guerre (Sengoku jidai).
Malgré ces récits passionnants, aucune de ces théories n'a été formellement prouvée, les élevant au rang de mythes qui ajoutent au prestige de cette lame.
Un sabre au cœur de l'histoire
du shogunat Tokugawa
Le Mikazuki Munechika entre véritablement dans l'histoire vérifiée lorsqu'il est offert au shogun Tokugawa Hidetada, deuxième shogun du shogunat d'Edo, à l'occasion du décès de Kodai-in (Nene), épouse du grand unificateur Toyotomi Hideyoshi, vers 1624.
Le sabre devient alors un trésor jalousement gardé au sein de la collection des Tokugawa, témoin des intrigues et de l'apogée du Japon féodal.
Après la chute du shogunat et les bouleversements de l'ère Meiji, le Mikazuki passe entre les mains de collectionneurs privés, jusqu'à son acquisition par le Musée National de Tokyo, où il repose aujourd’hui, trésor national accessible aux passionnés d’histoire.
Un chef-d'œuvre inégalé
Le Mikazuki Munechika incarne l'excellence de la forge japonaise : sa courbure gracieuse (sori), son hamon d'une finesse inégalée et son hada soyeux révèlent tout le savoir-faire du forgeron Munechika.
Ce sabre japonais, au-delà de son rôle d'arme, incarne l'âme des samouraïs, unissant art, spiritualité et prouesse martiale.
En contemplant le Mikazuki Munechika au
Musée National de Tokyo , on comprend pourquoi ce nihonto transcende les siècles : il est bien plus qu'une arme, c'est une œuvre d'art et le symbole de l'excellence du savoir faire des forgerons japonais.